(Dé)connexion du marché dans le secteur pétrolier canadien

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La rentabilité des ressources énergétiques dépend de la possibilité de les transporter de manière économique et dans des conditions de marché favorables. Des facteurs comme la guerre en Ukraine, le climat politique tendu [en anglais] en Europe de l’Est et l’évolution récente de la dynamique commerciale dans le secteur pétrolier canadien ont fait ressortir le lien essentiel qui existe entre l’infrastructure de transport et l’accès aux marchés. Comme l’illustre la figure 1, une part considérable des réserves canadiennes de pétrole se trouve à l’intérieur des terres. En 2020, l’Alberta et la Saskatchewan représentaient 80,5 % et 10,5 %, respectivement, du volume total de production de pétrole brut.

Figure 1 – Production et infrastructure de transport du pétrole brut au Canada, 2020

La carte présente les principaux pipelines de pétrole brut et à usage mixte au Canada et au Nord des États-Unis ainsi que la production de pétrole brut par province et territoire en pourcentage de la production canadienne totale. L’Alberta produit plus de 80 % du pétrole brut canadien alors que la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, le Manitoba et Terre-Neuve-et-Labrador en produisent chacune moins de 11 %.

Sources : Carte produite par la Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 2022, à partir de données tirées de Plateforme géospatiale fédérale, Série CanVec – Entités gestion des ressources, « Mines, énergie et réseaux de communication au Canada », 2019; Ressources naturelles Canada, Cahier d’information sur l’énergie 2020-2021; Régie de l’énergie du Canada, Profils pipeliniers; Energy Information Administration des États-Unis, Crude Oil Pipelines [en anglais]; Gouvernement du Canada, Limites administratives au Canada – Série CanVec – Entités administratives. Licence du gouvernement ouvert – Canada. Le logiciel suivant a été utilisé : Esri, ArcGIS Pro, version 2.9.1.

La figure 1 montre également que la majeure partie du réseau d’oléoducs du Canada relie essentiellement les producteurs canadiens aux raffineurs et aux consommateurs aux États-Unis. Un nombre moins important d’oléoducs se rendent jusqu’à la côte Ouest du Canada pour l’expédition directe du pétrole à l’étranger, toutefois, lorsque le pétrole brut est acheminé dans un terminal portuaire, il peut être transporté de façon économique par pétrolier vers un plus grand nombre de destinations internationales.

En 2019, les États-Unis étaient le premier producteur de pétrole brut au monde (19 %). Le Canada se situait au quatrième rang (6 %), avec une production d’environ six millions de barils par jour (Mb/j), comme le montre la figure 2.

Figure 2 – Principaux pays producteurs de pétrole brut, 2019 (production mondiale : 98,1 Mb/j)

Cette figure présente les cinq premiers pays producteurs de pétrole brut en 2019. Les États-Unis étaient les plus grands producteurs de pétrole brut avec 19 % de la production mondiale, suivis de l’Arabie saoudite avec 12 %, de la Russie avec 12 %, du Canada avec 6 % et de l’Iraq avec 5 %. La production mondiale de pétrole brut s’élevait à 98,1 millions de barils par jour.

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Ressources naturelles Canada, Cahier d’information sur l’énergie 2020-2021, p. 48.

Comparé au transport ferroviaire,  le réseau de pipelines du Canada constitue l’un des moyens les plus sûrs et les plus économiques de transporter le pétrole brut. Selon le Congressional Research Service des États-Unis, le transport d’un baril de pétrole coûte de 5 à 10 $ US de moins par pipeline que par rail.

Inversement, moins il existe de raccordements de pipelines à la côte, moins le pétrole peut être acheminé vers les marchés internationaux, comme l’Europe, dont le principal fournisseur de pétrole est la Russie (voir la figure 3).

Figure 3 – Principaux pays fournisseurs de pétrole de l’Union européenne, 2020

La figure compare les principaux pays fournisseurs de pétrole brut de l’Union européenne en 2020. La Russie était le principal fournisseur avec 29 % des importations européennes totales de pétrole brut, suivie des États-Unis avec 9 %, de la Norvège avec 8 %, de l’Arabie saoudite avec 7 %, du Royaume-Uni avec 7 %, du Nigéria avec 6 % et du Kazakhstan avec 6 %.

Sources : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Eurostat, From where do we import energy? [en anglais], 2020; et Transport et Environnement, « Europe increasingly dependent on risky oil imports », juillet 2016 [en anglais].

En 2018, le Canada était le troisième exportateur de pétrole brut au monde, mais 98 % de ses exportations approvisionnaient les États-Unis.

Figure 4 – Cinq principaux pays exportateurs de pétrole brut, 2018
(exportations mondiales : 48,8 Mb/j)

Cette figure présente les cinq principaux pays exportateurs de pétrole brut en 2018. L’Arabie saoudite a exporté la plus grande quantité de pétrole brut avec 15 % des exportations mondiales, suivie de la Russie avec 11 %, du Canada avec 8 %, de l’Iraq avec 8 %et des Émirats arabes unis avec 6 %. Le total des exportations mondiales de pétrole brut s’est élevé à 48,8 millions de barils par jour en 2018.

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Ressources naturelles Canada, Cahier d’information sur l’énergie 2020-2021, p. 48.

Par ailleurs, le pétrole ne se vend pas au même prix sur les côtes. Le réseau de pipelines du Canada alimente un marché essentiellement sans accès à la mer dont la dynamique diffère de celle du marché international pour le pétrole transporté par voies navigables. Depuis 2007, la production de pétrole en Alberta a plus que doublé [en anglais] alors que le nombre de connexions par pipeline vers les terminaux côtiers du Canada est resté en grande partie inchangé. L’augmentation en flèche de l’offre continentale, conjuguée à un nombre insuffisant de pipelines vers les côtes, pourrait avoir contribué au fait que le pétrole se vende à un fort rabais à Edmonton comparativement au pétrole vendu dans une ville portuaire comme Montréal. La figure 5 illustre les fluctuations des écarts de prix entre les pétroles bruts de référence West Texas Intermediate (WTI) et Brent. Le Brent, produit dans la mer du Nord, est le pétrole brut léger de référence en Europe et le WTI est la référence américaine. Lorsque le pétrole brut est expédié en Amérique du Nord par pipeline ou par rail, son prix est fondé sur le WTI; lorsqu’il est importé par pétrolier, son prix est basé sur le Brent.

Figure 5 – Fluctuations des écarts de prix entre le baril de référence West Texas Intermediate et le baril de référence Brent, de 2000 à 2020

Cette figure montre les écarts de prix entre les barils de pétroles bruts de référence West Texas Intermediate et Brent, de janvier 2000 à janvier 2020, deux décennies marquées par de grandes fluctuations. On constate un écart de prix positif en janvier 2000 (+1,75 $) qui devient un écart négatif en janvier 2020 (‑6,13 $). L’écart négatif le plus considérable au cours de cette période est de -27,31 $ en septembre 2011.

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Energy Information Administration des États-Unis, Petroleum and Other Liquids, « Spot Prices ».

Compte tenu de ces écarts de prix et de l’accès limité aux marchés internationaux, il n’est pas étonnant que des projets de pipelines, tels que Keystone XL [en anglais], le projet Northern Gateway, le projet d’agrandissement du réseau de Trans Mountain et le projet Oléoduc Énergie Est [en anglais], aient été proposés pour tenter de relier les producteurs de pétrole de l’Alberta aux marchés internationaux par un terminal côtier.

 

Ressources connexes

Régie de l’énergie du Canada. « Exportations de pétrole brut du Canada : rétrospective des 30 dernières années ».

Desjardins, Jeff. Visual Capitalist, « Canadian Oil and Gas: The U.S. needs less, Asia needs more », 26 août 2013 [en anglais].

Ressources naturelles Canada. Cahier d’information sur l’énergie 2020-2021.

PricewaterhouseCoopers s.r.l. Energy Visions 2020 – Forward together: What’s ahead for Canada’s oil and gas industry [sommaire en français : « Energy Visions 2020 – Avancer ensemble : Les perspectives d’avenir du secteur pétrolier et gazier canadien »].

 

Révisé par Emmanuel Preville et Sirina Kerim-Dikeni, Bibliothèque du Parlement
Version originale rédigée par Mathieu Frigon et Mohamed Zakzouk, Bibliothèque du Parlement



Catégories :Agriculture, environnement, pêches et ressources naturelles, Industrie, entreprises et commerce

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