Le rôle de la Cour suprême du Canada – composition et procédure de nomination

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La Cour suprême du Canada a été créée par une loi en 1875. La présente Note de la Colline décrit l’évolution de la composition et du processus de nomination des juges de la Cour suprême au fil des ans.

Rôle de la Cour suprême

En tant que cour générale d’appel du Canada, la Cour suprême tire son autorité de l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 et de l’article 3 de la Loi sur la Cour suprême.

Elle constitue le tribunal de dernière instance en matière pénale depuis 1933, et en matière civile depuis 1949. À compter de ces dates, le droit d’appel devant le Comité judiciaire du Conseil privé au Royaume-Uni a été aboli.

Composition de la Cour

Aux termes de la Loi sur la Cour suprême, la Cour se compose d’un juge en chef et de huit autres juges qui occupent leur poste à titre inamovible jusqu’à l’âge de 75 ans.

De ces neuf juges, trois doivent provenir du Québec, en raison de leur connaissance du droit civil et afin que « les traditions juridiques et les valeurs sociales distinctes du Québec » y soient représentées (Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, art. 5 et 6, par. 49). La tradition veut que trois des six autres juges proviennent de l’Ontario, deux des provinces de l’Ouest et un des provinces de l’Atlantique.

Les candidats sont choisis parmi les personnes qui sont ou ont été juges d’une Cour supérieure d’une province, y compris d’une cour d’appel, ou parmi les personnes qui sont ou ont été inscrites comme avocat au barreau d’une province pendant au moins 10 ans.

Cependant, en 2014, dans le Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, art. 5 et 6, la Cour suprême du Canada a stipulé que les trois juges du Québec sont choisis parmi les juges actuels de la Cour supérieure ou de la Cour d’appel du Québec, ou parmi les avocats actuels inscrits depuis au moins 10 ans au Barreau du Québec (par. 70).

La composition de la Cour ne peut pas être modifiée unilatéralement par le Parlement. Un tel changement requiert l’adoption de résolutions du Sénat et de la Chambre des communes ainsi que de l’Assemblée législative de chaque province (Loi constitutionnelle de 1982, al. 41d))

Processus de nomination antérieurs

En pratique, même si le gouverneur général est habilité par la Loi sur la Cour suprême à nommer les juges à la Cour suprême, il exerce ce pouvoir en se fondant sur l’avis du premier ministre et de son Cabinet.

En 2004, alors qu’il était ministre de la Justice, Irwin Cotler a comparu devant le Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile de la Chambre des communes afin de décrire pour la première fois en public le processus de sélection des juges de la Cour suprême. Le ministre a décrit le processus de consultation et les critères d’évaluation des candidats, qui se répartissent en trois grandes catégories : aptitudes professionnelles, qualités personnelles et diversité.

Après l’annonce de la nomination des juges Abella et Charron en 2004, le ministre de la Justice avait défendu ces choix devant un comité spécial intérimaire formé de députés et de représentants de la communauté juridique.

La procédure a été modifiée au fil des nominations ultérieures. Avant la nomination du juge Rothstein en 2006, un comité consultatif comprenant des députés de différents partis a été nommé pour examiner et établir une liste restreinte de candidats. La sélection finale a été faite par le premier ministre et le Cabinet. Le juge Rothstein a ensuite comparu devant un comité spécial de députés qui l’interrogeait lors d’une audience publique. Cette audience a servi des fins d’information seulement – le comité spécial ne pouvant pas empêcher la nomination.

Ce processus d’examen par un comité de députés, suivi d’une audience publique, a été utilisé subséquemment lors de la nomination des juges Moldaver (2011), Karakatsanis (2011), Wagner (2012) et Nadon (2013).

Il n’a toutefois pas été employé dans le cas du juge Cromwell (2008), qui a été nommé officiellement après la prorogation du Parlement, ni de la nomination des juges Gascon (2014), Côté (2014) et Brown (2015). Avant la nomination du juge Gascon, la Cour suprême a conclu que la nomination du juge Nadon était nulle dès le départ (Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, art. 5 et 6, par. 6).

Le nouveau processus de nomination

En 2016, le gouvernement a introduit un nouveau processus permettant aux candidats qualifiés de présenter une demande de nomination à la Cour suprême par l’entremise du Commissariat à la magistrature fédérale.

Dans ce nouveau processus, le Comité consultatif indépendant sur la nomination des juges de la Cour suprême du Canada non partisan (le Comité) recherche activement des candidats, examine les candidatures et soumet une liste restreinte non contraignante au premier ministre, qui choisit ensuite le candidat final.

Comme le prévoit son mandat, le Comité est composé de trois membres nommés par le ministre de la Justice, dont au moins deux ne sont pas des avocats, et de quatre membres nommés par des organisations juridiques, dont deux avocats en exercice, un juge de cour supérieure à la retraite et un expert en droit. Contrairement aux processus précédents, il ne comprend aucun parlementaire.

Le Comité est tenu de présenter un rapport public sur la façon dont il s’acquitte de son mandat. Le questionnaire et les critères d’évaluation utilisés par le Comité, ainsi que certaines des réponses au questionnaire fournies par le candidat sélectionné, sont également rendus publics.

Une fois le candidat sélectionné, le ministre de la Justice et le président du Comité se présentent devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes pour expliquer le processus et la décision.

Le candidat participe également à une séance publique de questions et réponses avec des députés et des sénateurs, y compris un représentant de chaque parti politique ayant au moins un siège à la Chambre des communes. Comme dans le processus précédent, cette séance n’a qu’un but informatif et les questions sur des sujets tels que les décisions futures ne sont pas autorisées. Les opinions des parlementaires peuvent orienter la décision du premier ministre, mais ne la lient pas.

Le nouveau processus établi en 2016 a été utilisé pour nommer les juges Rowe (2016), Martin (2017) et Kasirer (2019). Dans ce dernier cas, la composition du Comité a été adaptée pour tenir compte du fait que la nomination visait l’un des sièges du Québec à la Cour. Le processus de 2016 sera à nouveau utilisé en 2021 pour remplacer la juge Abella, qui prendra sa retraite de la Cour à compter du 1er juillet 2021.

Diversité à la Cour

Lors des récents processus de nomination, une grande attention a été accordée à la diversité à la Cour. Les critères d’évaluation utilisés depuis 2016 incluent la nécessité de veiller à ce que les membres de la Cour « reflètent raisonnablement la diversité de la société canadienne ».

Ces dernières années, de nombreux commentateurs ont demandé la nomination d’un juge autochtone. Des appels ont également été lancés en faveur d’une meilleure représentation des minorités visibles, compte tenu notamment du mouvement Black Lives Matter. En même temps, d’autres considérations de diversité liées à la représentation régionale, à la langue et au sexe ont également été en jeu – parfois de manière contradictoire, selon les commentaires des médias.

Alors que le processus de nomination de 2016 était ouvert aux candidats de tout le Canada, le premier ministre a finalement respecté les conventions de représentation régionale en nommant un juge du Canada atlantique. Les processus ultérieurs ont été limités à des candidats de régions particulières.

En outre, le nouveau processus a toujours exigé que les personnes nommées soient fonctionnellement bilingues en français et en anglais. Les récentes nominations ont également permis de maintenir l’équilibre entre les hommes et les femmes au sein de la Cour.

Auteurs : Maxime Charron‑Tousignant et Robin MacKay, Bibliothèque du Parlement
Révisée par : Dana Phillips, Bibliothèque du Parlement



Catégories :Gouvernement, Parlement et politique, Lois, justice et droits

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