La sélection et la nomination du gouverneur général au fil du temps

Temps de lecture : 5 minutes

Available in English.

À l’heure actuelle, le gouverneur général est nommé par la Couronne sur l’avis du premier ministre. Le mode de sélection et de nomination a beaucoup évolué depuis la Confédération.

À l’origine, l’exécutif canadien n’avait que peu d’influence sur la nomination. À mesure que le Canada a affirmé son indépendance, son influence s’est accrue. Ces dernières années, des premiers ministres se sont tournés vers des groupes consultatifs pour éclairer leur choix.

Cette Note de la Colline traite de l’évolution du mode de sélection et de nomination des gouverneurs généraux du Canada et compare les différents groupes consultatifs qui ont été constitués au fil des ans.

Le mode de sélection et de nomination depuis la Confédération

Au début de l’histoire du Canada, la Couronne nommait le gouverneur général sur l’avis du secrétaire d’État britannique aux Colonies, avec l’approbation du premier ministre britannique.

Selon des sources de presse, en 1890, il a été convenu que le Cabinet canadien serait consulté dans le cadre du processus. Cependant, cette consultation n’avait pas toujours lieu.

Les gouverneurs généraux étaient britanniques et étaient choisis parmi les membres de la famille royale britannique ou dans les rangs de la noblesse et des hauts gradés militaires à la retraite. Le nouveau gouverneur général était accueilli à sa descente du navire, et la cérémonie d’installation avait lieu au port d’arrivée, et non à Ottawa.

Rapport Balfour

Peu après l’affaire King-Byng se tient à Londres la Conférence impériale de 1926. Les premiers ministres des dominions britanniques s’y réunissent pour clarifier la relation unissant leurs pays à la Grande-Bretagne.

Le Rapport Balfour [en anglais], produit par le comité des relations interimpériales à l’issue de la Conférence impériale, déclare que le Canada possède le même statut que la Grande‑Bretagne et les autres dominions du Commonwealth. Il reconnaît également que le gouverneur général n’est plus un représentant ni un agent du gouvernement britannique, mais plutôt de la Couronne.

Le mode de nomination du gouverneur général est clarifié à l’occasion de la Conférence impériale de 1930. Selon les actes de la Conférence [en anglais], il a été convenu que les ministres du Commonwealth « […] présenteraient leur avis officiel après consultation informelle de Sa Majesté » [traduction]. C’est ainsi qu’a été établie la procédure actuelle voulant que la Couronne nomme le gouverneur général sur l’avis du Cabinet.

Même si la responsabilité de conseiller la Couronne incombait désormais au premier ministre, ce dernier consultait parfois d’autres chefs de parti avant de formuler sa recommandation. En 1935, par exemple, le premier ministre R.B. Bennett a consulté le chef de l’Opposition William Lyon Mackenzie King avant de recommander la nomination de lord Tweedsmuir.

photographie

Source : Bibliothèque et Archives Canada
Description : Le premier ministre William Lyon Mackenzie King, nouvellement élu, lit un discours au Sénat de l’Assemblée législative à Québec à l’occasion de l’installation de lord Tweedsmuir à titre de gouverneur général.

Le premier gouverneur général né au Canada

En 1952, le premier Canadien est investi du titre de gouverneur général. La nomination de Vincent Massey, faite sur l’avis du premier ministre Louis St-Laurent, représente un pas de plus vers l’indépendance à l’égard du Royaume-Uni. Depuis la nomination de Vincent Massey, tous les gouverneurs généraux ont été des citoyens canadiens.

Dans une lettre parue dans la presse après l’annonce de la nomination, le premier ministre St-Laurent a déclaré : « Il me semble qu’aucun des sujets du roi, où qu’il habite, ne doive être jugé indigne de représenter le roi, à condition de posséder les qualités personnelles et le statut social convenant à la dignité et à la responsabilité de cette charge [traduction]. » Il a également fait remarquer que le Canada était alors le seul pays du Commonwealth, à part Ceylan (aujourd’hui le Sri Lanka), où le roi n’avait jamais été représenté par un sujet local.

Certaines sources médiatiques ont émis l’hypothèse qu’un Canadien avait été choisi parce qu’aucun membre de la famille royale n’était disponible, mais Vincent Massey avait été le premier à exercer les fonctions de haut-commissaire auprès du Royaume‑Uni, et le choix a été salué de part et d’autre de l’Atlantique.

Source : Office national du film du Canada / Bibliothèque et Archives Canada
Description : Le premier ministre Louis St-Laurent lit un discours au Sénat du Canada à l’occasion de l’installation du très hon. Vincent Massey à titre de gouverneur général.

Groupes consultatifs

Comité pour la sélection du gouverneur général

Durant la majeure partie de l’histoire du Canada, aucun groupe consultatif n’a été constitué pour aider le premier ministre à choisir le titulaire de la charge de gouverneur général.

En 2010, cependant, vers la fin du mandat de Michaëlle Jean au poste de gouverneur général, le premier ministre Stephen Harper a confié à un comité pour la sélection du gouverneur général le mandat de le conseiller sur la nomination du successeur de Mme Jean.

Le Comité devait tenir compte d’une question clé dans l’examen des candidatures à proposer : « Le prochain gouverneur général sera-t-il en mesure de servir sans parti pris politique et en fonction du rôle constitutionnel qui lui est confié? »

Le Comité comptait six membres :

  • Sheila-Marie Cook, secrétaire et adjointe de la gouverneure générale (présidente)
  • Rainer Knopff, professeur de science politique, Université de Calgary
  • Kevin MacLeod, huissier du bâton noir, Sénat du Canada
  • Christopher Manfredi, doyen des arts, Université McGill
  • Christopher McCreery, secrétaire particulier du lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse
  • Jacques Monet, directeur, Institut canadien des études jésuites

À l’issue du processus de sélection, le très hon. David Johnston a été nommé le 8 juillet 2010.

Comité consultatif sur les nominations vice-royales

En 2012, plusieurs années avant la fin du mandat de David Johnston, le premier ministre Harper a mis sur pied le Comité consultatif sur les nominations vice-royales.

Le mandat de ce comité était plus vaste que celui du Comité de 2010. Il devait adresser des recommandations non contraignantes au premier ministre sur la nomination non seulement du gouverneur général, mais aussi des lieutenants‑gouverneurs et des commissaires territoriaux.

Le Comité était composé de cinq membres, dont certains avaient siégé au Comité de 2010 :

  • Kevin MacLeod, huissier du bâton noir et secrétaire canadien de la reine, poste créé au moment de l’annonce de la mise sur pied du Comité (président d’office)
  • deux membres fédéraux permanents :
    • Robert Watt, juge de la citoyenneté et ancien héraut d’armes du Canada
    • Jacques Monet, directeur, Institut canadien des études jésuites
  • deux membres régionaux temporaires pour la nomination d’un nouveau lieutenant-gouverneur ou commissaire territorial

Après la 42e élection générale, le Comité a cessé ses activités.

Groupe consultatif pour la sélection du prochain gouverneur général

Le 12 mars 2021, au lendemain de la démission de la très hon. Julie Payette, le gouvernement a annoncé la création du Groupe consultatif pour la sélection du prochain gouverneur général.

Comme le Comité de 2010, le Groupe a été formé spécialement pour sélectionner des candidats pour combler une vacance particulière.

Alors que le Comité de 2010 et le Comité consultatif de 2012 réunissaient principalement des personnes qui avaient des liens avec la charge de gouverneur général ou un intérêt à l’égard de celle-ci, les membres du Groupe consultatif de 2021 « ont été sélectionnés en raison des perspectives diversifiées qu’ils pourraient apporter ».

Les six membres du Groupe étaient :

  • L’hon. Dominic LeBlanc, président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales (coprésident)
  • Janice Charette, greffière par intérim du Conseil privé (coprésidente)
  • Daniel Jutras, recteur, Université de Montréal
  • Judith LaRocque, présidente du conseil d’administration du Musée canadien de la nature et ancienne secrétaire du gouverneur général
  • Natan Obed, président, Inuit Tapariit Kanatami
  • Suromitra Sanatani, présidente par intérim du conseil d’administration de Postes Canada

Le Groupe consultatif de 2021 est aussi le premier à avoir compté parmi ses membres un représentant du Cabinet, le ministre LeBlanc.

Il est encore trop tôt pour déterminer si le recours à des groupes consultatifs contribue à une diversité accrue des nominations. Quatre des gouverneurs généraux du Canada ont été des femmes, dont deux femmes de couleur. Toutes ont été nommées à l’issue d’un processus de sélection mené sans l’apport d’un groupe consultatif officiel.

Auteure : Stephanie Feldman, Bibliothèque du Parlement



Catégories :Gouvernement, Parlement et politique

Tags:,

En savoir plus sur Notes de la Colline

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading