Le contexte international de la protection des réfugiés

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(Available in English: International Context for Refugee Protection)

Le nombre de personnes déplacées dans le monde n’a jamais été aussi élevé, à cause des persécutions, des conflits, de la violence généralisée et des violations des droits de la personne.

Selon un rapport publié par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), à la fin de 2014, le nombre de personnes déplacées a atteint le sommet inégalé de 59,5 millions, ce qui représente un être humain sur 122.

La présente Note de la Colline décrit le cadre juridique international pour la protection des réfugiés et les « solutions durables » établies par le UNHCR – des solutions visant à mettre un terme au cycle des déplacements et à permettre aux réfugiés de reprendre une vie normale.

Le cadre juridique international

L’accord international au cœur de la protection des réfugiés – La Convention relative au statut des réfugiés, communément appelée Convention sur les réfugiés – ne s’appliquait à l’origine qu’aux réfugiés de la Seconde Guerre mondiale.

En 1967, un protocole supprimant toute restriction temporelle et géographique a été ajouté à la Convention. Cent quarante États ont signé l’un ou l’autre de ces instruments, ou les deux (comme c’est le cas du Canada).

La Convention sur les réfugiés donne une définition internationale commune de ce que l’on entend par « réfugié », définition qui a également été reprise dans la législation canadienne.

D’après cette définition, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques :

  • soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ces pays;
  • soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

Les signataires de la Convention sur les réfugiés ont certaines obligations. Les deux principales consistent, d’une part, à offrir aux demandeurs d’asile un processus équitable d’étude de leur dossier et, d’autre part, à appliquer le principe du non‑refoulement, c’est‑à-dire à ne pas renvoyer des personnes dans des pays où elles risqueraient d’être persécutées.

En réalité, le droit international en matière de droits de la personne et le droit international coutumier semblent indiquer que tous les États pourraient avoir pour responsabilité d’éviter le refoulement.

La protection de personnes dans une situation semblable à celle des réfugiés est aussi offerte conformément à d’autres instruments juridiques régionaux ou internationaux et à des législations nationales. Par exemple, le Canada a signé et ratifié la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Par conséquent, la protection garantie aux réfugiés en vertu de la législation canadienne est accordée également aux personnes qui risquent – selon l’évaluation qui est faite de chaque cas – la mort, la torture, ou des peines ou traitements cruels ou inusités.

Des instruments juridiques régionaux, comme la Convention de l’OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique adoptée par l’Organisation de l’unité africaine en 1969, donnent une définition plus large du terme « réfugié » qui englobe toute personne exposée à la violence généralisée.

Où vont les réfugiés?

Un grand nombre de personnes touchées par la violence ne deviennent jamais des réfugiés parce qu’elles ne traversent pas une frontière internationale pour trouver la sécurité. En 2014, on estimait à 38,2 millions le nombre de ces personnes dites « déplacées à l’intérieur de leur pays » – soit le plus haut niveau depuis 1989, année où l’on a recueilli des statistiques mondiales pour la première fois.

Les réfugiés peuvent aussi passer par plusieurs pays, de leur propre initiative, en quête de sécurité et pour rebâtir leur vie. Ces personnes sont des demandeurs d’asile. Elles cherchent une protection, mais leur statut de réfugié n’a pas été déterminé.

La manière dont les États répondent aux demandeurs d’asile dépend en partie des engagements internationaux auxquels ces États ont souscrit. Au Canada, c’est la Commission de l’immigration et du statut de réfugié qui se prononce sur les demandes d’asile.

Tableau 1 – Demandes d’asile présentées en Europe et dans certains pays non européens, 2010-2014

Pays/Région d’asile 2010 2011 2012 2013 2014 Classement en 2014
Allemagne 41 330 45 740 64 540 109 580 173 070 1
États‑Unis 49 310 70 030 78 410 84 400 121 160 2
Turquie 9 230 16 020 26 470 44 810 87 820 3
Suède 31 820 29 650 43 890 54 260 75 090 4
Italie 10 050 40 360 17 350 25 720 63 660 5
France 48 070 52 150 55 070 60 230 59 030 6
Hongrie 2 100 1 690 2 160 18 570 41 370 7
Royaume‑Uni 22 640 25 900 27 980 29 880 31 260 8
Autriche 11 010 14 420 17 410 17 500 28 060 9
Pays‑Bas 13 330 11 590 9 660 14 400 23 850 10
Canada 23 160 25 350 20 500 10 380 13 450 15
Source : UNHCR, Asylum Trends 2014: Levels and Trends in Industrialized Countries, p. 20.

 

Les trois « solutions durables » : l’intégration, la réinstallation et le rapatriement

Le UNHCR est l’organisation mandatée par les Nations Unies pour diriger et coordonner l’action internationale de protection des réfugiés à travers le monde et la recherche de solutions à leurs problèmes. Le UNHCR applique traditionnellement trois « solutions durables » à l’égard des réfugiés : l’intégration sur place, dans le pays de premier asile; la réinstallation dans un pays tiers; et le rapatriement, c’est‑à-dire le retour au pays d’origine.

Cependant, ces solutions sont de moins en moins adéquates en raison du nombre élevé de réfugiés qui ont besoin de protection et des situations d’insécurité prolongées qui existent dans le monde aujourd’hui.

L’intégration sur place

La plupart des réfugiés qui quittent leur pays restent dans les pays voisins. Certains pays de premier asile (plus particulièrement ceux qui n’ont pas signé la Convention sur les réfugiés) acceptent d’accueillir des réfugiés, mais seulement de manière temporaire. Les réfugiés qui se trouvent dans ces pays n’ont pas toujours le droit de travailler et peuvent être contraints d’habiter dans des camps.

L’afflux massif de réfugiés exerce des pressions considérables sur les pays de premier asile, qui ont souvent besoin d’une aide financière pour offrir aux réfugiés les biens et services de première nécessité au quotidien, comme les soins médicaux et l’éducation pour les enfants d’âge scolaire. Selon le UNHCR, en 2014, 42 % des réfugiés relevant de son mandat résidaient dans des pays dont le produit intérieur brut par habitant était inférieur à 5 000 $ US.

En 2014, le Canada se situait au 41e rang mondial pour le nombre de réfugiés en proportion de sa population, avec 4,2 réfugiés pour 1 000 habitants.

Figure 1 – Nombre de réfugiés pour 1 000 habitants, 2014

Carte du monde montrant le nombre de réfugiés pour 1000 habitants, 2014

Sources : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 2016. La figure a été produite à partir de données tirées de UNHCR, « Table 26: Indicators of host country capacity and contributions, end-2014 », World at War: UNHCR Global Trends – Forced Displacement in 2014; et Natural Earth, 1:50m Cultural Vectors. Le logiciel utilisé est Esri, ArcGIS, version 10.3.1.

 

La réinstallation

D’après le UNHCR, la réinstallation « implique la sélection et le transfert de réfugiés d’un État dans lequel ils ont cherché une protection vers un autre État qui accepte de les accueillir comme réfugiés avec un statut de résident permanent ».

Le UNHCR dirige les réfugiés vers les pays qui se sont déclarés prêts à participer à un programme de réinstallation (voir la figure 2 et le tableau 2).

Figure 2 ­– Réinstallation de réfugiés dans les pays participants, 2014 (pourcentage par pays d’arrivée)

Figure 2 FR

Sources : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 2016. La figure a été produite à partir de données tirées de UNHCR, « Table 23, Resettlement arrivals of refugees, 2014 », World at War: UNHCR Global Trends – Forced Displacement in 2014; et Natural Earth, 1:50m Cultural Vectors. Le logiciel utilisé est Esri, ArcGIS, version 10.3.1.

 

Au Canada, le gouvernement travaille en partenariat avec des particuliers et des organisations de la société civile dans le cadre du Programme de parrainage privé de réfugiés, dans le but d’accroître le nombre de réfugiés réinstallés ici.

Les réfugiés ne font pas tous l’objet d’une recommandation de réinstallation dans un pays tiers par le UNHCR. Ce dernier recommande habituellement environ 8 % des réfugiés dans le monde. Il a tendance à établir la priorité des dossiers en fonction des besoins des personnes (p. ex. besoin de protection juridique et/ou physique, besoins médicaux), de leur vulnérabilité (p. ex. les femmes et filles dans les situations à risque), de la possibilité de regroupement familial et de l’absence d’autres solutions durables à court terme.

Jusqu’à présent, les États ont offert 80 000 places de réinstallation pour 2016. Or, le UNHCR estime que plus de 1 150 000 personnes auront besoin d’être réinstallées, soit 22 % de plus que ce qui était prévu pour 2015. Malgré les engagements spéciaux concernant les réfugiés syriens et l’instauration de nouveaux programmes, le UNHCR se tourne vers d’autres solutions d’immigration, comme les visas d’étudiant et le regroupement familial, pour offrir davantage de protection.

Le rapatriement                  

Le UNHCR préconise le rapatriement de réfugiés uniquement lorsque ces derniers y consentent librement, que la situation dans le pays d’origine est sécuritaire et que les droits des rapatriés sont garantis.

Selon le UNHCR, même si le retour au pays d’origine est la solution durable la plus importante numériquement, le nombre de réfugiés rapatriés n’a jamais été aussi bas en 30 ans. En 2014, 126 800 réfugiés ont été rapatriés volontairement, la plupart d’entre eux étant retournés en République démocratique du Congo et au Mali.

Ressources connexes

Béchard, Julie, et Sandra Elgersma. La protection des réfugiés au Canada, publication no 2011‑90‑F, Ottawa, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, 15 juillet 2013.

Béchard, Julie, et Sandra Elgersma. L’aide aux réfugiés parrainés par le gouvernement et choisis à l’étranger, publication no 2011-94-F, Ottawa, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, 29 août 2014.

Elgersma, Sandra. La réinstallation des réfugiés – Les engagements d’ordre humanitaire du Canada, publication no 2015-11-F, Ottawa, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, 1er avril 2015.

UNHCR. UNHCR Resettlement Handbook and Country Chapters, 4 novembre 2014. Il existe une version française de ce document, mais qui ne comprend pas les chapitres sur les pays : UNHCR, Manuel de réinstallation du HCR, 8 avril 2013.

UNHCR. World at War: UNHCR Global Trends – Forced Displacement in 2014. (La plupart des chiffres de l’UNHCR mentionnés dans la présente Note de la Colline proviennent de ce document.)

Auteure : Sandra Elgersma, Bibliothèque du Parlement



Catégories :Affaires internationales et défense, Lois, justice et droits

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