Consentement pour le don d’organes au Canada

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Chaque semaine, quelque cinq Canadiens meurent en attente d’une greffe d’organe. Les donneurs décédés sont une source importante d’organes destinés à la transplantation puisque chaque donneur peut fournir jusqu’à huit organes. Entre 2010 et 2019, l’Institut canadien d’information sur la santé a signalé une augmentation de 59 % du taux de donneurs d’organes décédés au Canada et une augmentation de 42 % du nombre de transplantations d’organes.

Malgré cette hausse, le nombre de Canadiens ayant besoin d’une greffe continue d’augmenter plus rapidement que le nombre d’organes disponibles. Dans le cadre du débat sur les stratégies pour accroître le nombre de donneurs d’organes décédés, le concept du consentement présumé fait l’objet d’une attention plus importante.

Approches relatives au consentement pour le don d’organes

  • Le consentement explicite (« participation volontaire ») fait référence à un système qui permet aux gens de faire connaître leur choix de devenir un donneur après le décès, que ce soit par l’entremise d’un registre, d’une carte d’assurance‑maladie ou d’un permis de conduire. Lorsqu’un choix n’a pas été exprimé, le plus proche parent peut consentir au don.
  • Le consentement présumé (« retrait ») est une approche voulant que les personnes sont présumées avoir consenti au don d’organes, à moins d’avoir exprimé le souhait de ne pas être donneurs d’organes.

Au Canada, tous les aspects du don et de la greffe d’organes relèvent des provinces et des territoires, sauf pour ce qui est de la sécurité des organes donnés. L’ensemble des provinces et des territoires ont mis en œuvre des lois pour les régimes de consentement au don d’organes. Bien que la Nouvelle‑Écosse ait mis en œuvre un régime de consentement présumé en 2021, les autres provinces et territoires ont tous un régime de consentement explicite.

Système de consentement et taux internationaux de donneurs d’organes décédés en 2019

Les tenants du principe du consentement présumé soulignent [en anglais] que la plupart des pays affichant les plus hauts taux de donneurs décédés dans le monde ont établi des lois sur le consentement présumé. La carte interactive ci‑dessous fournit des renseignements sur le taux de donneurs d’organes décédés par million de personnes (PMP) dans divers pays et indique si la loi autorise le consentement explicite ou présumé.

Cliquez ici pour une description de la carte

Cartes produites par la Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 2021, à l’aide de données du Global Observatory on Donation and Transplantation (OGTD), 2019; Natural Earth, 1:50m Cultural Vectors, version 4.0.1; et Amanda Rosenblum et al., “The authority of next-of-kin in explicit and presumed consent systems for deceased organ donation: an analysis of 54 nations,” Nephrology Dialysis Transplantation, vol.27, no. 6, June 2012. Les logiciels suivants ont été utilisés : Esri, ArcGIS, version 10.8.0 et ArcGIS Online.

La figure ci‑dessous présente ces données sous forme de graphique pour comparer le taux de donneurs d’organes décédés au Canada avec celui d’autres pays.

Ce graphique montre, en ordre décroissant, le taux de donneurs décédés de 2019 dans plusieurs pays et indique si le pays utilise un régime de consentement présumé ou explicite. L’Espagne, où le consentement présumé est en vigueur, affiche le taux le plus élevé, à 49 donneurs par million de personnes, suivi des États Unis qui, en vertu d’un régime de consentement explicite, affichent un taux de près de 37 donneurs par million de personnes. Au Canada, le taux était de 21,8 donneurs par million de personnes.

Remarque : En 2019, le Royaume-Uni utilisait un système de consentement explicite, exception faite du pays de Galles, qui a adopté le consentement présumé en 2015. L’Angleterre et l’Écosse ont adopté des lois sur le consentement présumé en 2019, mais celles-ci n’avaient pas encore été mises en œuvre.
Source : Produit par la Bibliothèque du Parlement avec des données obtenues de International Registry on Organ Donation and Transplantation, Worldwide Actual Deceased Organ Donors 2019 (PMP) [en anglais]; Amanda Rosenblum et coll., « The authority of next-of-kin in explicit and presumed consent systems for deceased organ donation: an analysis of 54 nations, » [en anglais] Nephrology Dialysis Transplantation, vol. 27, no 6, juin 2012.

Le débat sur le consentement présumé

Il y a des questions à prendre en considération lorsqu’on examine le potentiel d’un régime de consentement présumé pour augmenter les taux de donneurs d’organes au Canada.

1. Approche du Canada à l’égard du consentement dans les questions de santé

Dans toutes les questions liées à la santé et aux soins de santé, les professionnels de la santé dans l’ensemble des provinces et des territoires au Canada sollicitent un consentement explicite et éclairé des gens qui sont traités ou des décideurs.

Cette forme de consentement suppose une discussion exhaustive entre le fournisseur de soins de santé et le patient pour expliquer le processus, de même que les risques et les bienfaits de tout traitement ou acte médical envisagé.

Certains intervenants soutiennent que le fait d’offrir de se retirer en vertu du consentement présumé est insuffisant puisque « l’absence d’objection ne peut pas être considérée comme étant un consentement éclairé » [traduction] [en anglais]. Cependant, on a également signalé [en anglais] qu’au Canada, la loi sur « le don d’organes n’impose pas une norme de “consentement éclairé” » [traduction]. Le consentement au don doit respecter uniquement les critères énoncés dans la loi sur le don d’organes.

Un article de 2012 [en anglais] a soutenu que l’appui à une approche axée sur le consentement présumé au don d’organes pouvait être en augmentation parmi les Canadiens, et que le consentement présumé devrait peut-être être mis en œuvre dans au moins une province ou un territoire. On pourrait ainsi mesurer son incidence sur le taux de donneurs d’organes sans changer les autres variables qui ont une incidence sur le taux.

Le 18 janvier 2021, en Nouvelle-Écosse, sont entrées en vigueur des modifications à la Human Organ and Tissue Donation Act [en anglais] de 2019, lesquelles ont introduit un régime de consentement présumé dans la province.

2. Bassin de donneurs

Au Canada, la plupart des provinces et territoires ont créé des registres en ligne où les résidents peuvent signifier leur intention de faire le don de leurs organes après leur mort. Les autres provinces et territoires, comme le Nouveau-Brunswick et Terre‑Neuve‑et‑Labrador, exigent que l’inscription soit faite à l’aide d’un formulaire à transmettre à l’administrateur de leur régime d’assurance-maladie respectif.

Selon la Société canadienne du sang, plus de 90 % des Canadiens sont favorables au don d’organes, mais seulement 32 % sont inscrits à un registre. Cet écart donne à penser que l’exigence du consentement explicite réduit le bassin de donneurs potentiels.

En vertu d’une approche axée sur le consentement présumé, pratiquement tous les résidents seraient considérés comme des donneurs potentiels, sauf ceux qui ont exprimé leur opposition. Un bassin de donneurs plus important devrait produire un taux de donneurs plus élevé.

Cependant, comme la figure ci‑dessous l’illustre, seulement une petite proportion de personnes qui décèdent peuvent être considérées comme étant des donneurs potentiels après qu’on applique divers critères, sans égard à l’approche axée sur le consentement.

Seulement une petite proportion de personnes qui décèdent peuvent être considérées comme étant des donneurs potentiels après qu’on applique divers critères, sans égard à l’approche axée sur le consentement.

Source : Produit par la Bibliothèque du Parlement à partir des données fournies dans ICIS, Donneurs décédés potentiels au Canada, figure 2, décembre 2014.

3. Taux de donneurs d’organes

Comme l’indique la figure ci-dessus, la majorité des pays affichant les taux de donneurs d’organes décédés les plus élevés ont également une loi sur le consentement présumé [en anglais], et plusieurs analyses ont tenté de déterminer si le consentement présumé, en soi, augmente le taux de donneurs. Bien que certaines études aient montré [en anglais] que le consentement présumé est associé à des taux de donneurs plus élevés même lorsque d’autres facteurs sont pris en compte, la majorité des analyses concluent [en anglais] qu’il faut également investir dans d’autres aspects des dons pour augmenter les taux.

En général, les pays affichant des taux élevés de dons d’organes ont investi dans des infrastructures de santé (en mettant l’accent sur l’identification et l’aiguillage des patients, la sensibilisation du public, les équipes dans les hôpitaux qui se consacrent au don et à la transplantation, etc.).

4. Rôle de la famille

La majorité des pays dans le monde autoriseront le don d’organes seulement avec le consentement de la famille [en anglais], peu importe le régime de consentement en place. Les cadres législatifs pour le consentement présumé peuvent être soit « laxistes », ce qui veut dire que les membres de la famille peuvent refuser d’autoriser le don d’organes à la suite d’un décès, soit « rigides », où les membres de la famille ne sont pas consultés.

Même en vertu de l’approche de participation volontaire employée dans la plupart des provinces canadiennes, il est peu probable [en anglais] que le prélèvement d’organes se fasse chez une personne inscrite au registre de dons d’organes si la famille s’y oppose. C’est pour cette raison que les organismes de don et de transplantation d’organes insistent [en anglais] sur l’importance de discuter de ses souhaits avec les membres de sa famille.

Ressources additionnelles

Sonya Norris Le don d’organes au Canada, Bibliothèque du Parlement, 16 avril 2021.

Sonya Norris, Don et greffe d’organes au Canada : Statistiques, tendances et comparaisons internationales, Bibliothèque du Parlement, 1er avril 2020.

Sonya Norris, Stratégies pour optimiser les dons et les greffes d’organes et de tissus, Bibliothèque du Parlement, 1er avril 2020.

Registre canadien des insuffisances et des transplantations d’organes de l’Institut canadien d’information sur la santé

Global Observatory on Donation and Transplantation [en anglais]

International Registry in Organ Donation and Transplantation [en anglais]

Auteure : Sonya Norris, Bibliothèque du Parlement



Catégories :Santé et sécurité

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