Le 14 septembre 2020, 8h55
(Available in English: Rebuilding Better: Calls for a Green, Inclusive, Sustainable Economic Recovery from the COVID-19 Pandemic)
Depuis les premiers jours de la pandémie de COVID‑19, les institutions internationales, la société civile, les chercheurs et le secteur privé ont demandé à maintes reprises aux pays d’éviter un retour à la normale et de plutôt mettre en œuvre des mesures de relance économique visant à « reconstruire en mieux ».
Au cours de la dernière décennie, l’expression « reconstruire en mieux » a principalement été utilisée dans le contexte des efforts de relance et de reconstruction qui suivent les catastrophes naturelles, telles que les ouragans, pour désigner la nécessité d’effectuer des investissements préventifs qui améliorent la résilience et réduisent les coûts humains et économiques des futures catastrophes. Depuis le début de la pandémie de COVID‑19, l’expression a été utilisée par les représentants de l’Organisation des Nations Unies (ONU), de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et d’autres organisations pour désigner la relance à la suite des conséquences de la pandémie.
La présente Note de la Colline fait état des progrès accomplis concernant le respect des engagements internationaux en matière de développement durable et de lutte contre les changements climatiques qui ont été pris avant la pandémie. Elle décrit ensuite certains appels internationaux en faveur d’une relance économique verte, inclusive et durable après la pandémie, tout en reconnaissant que ces termes peuvent avoir différentes significations et être utilisés de manière interchangeable avec l’expression « reconstruire en mieux ».
Alors que les pays élaborent leurs plans de relance économique suivant la pandémie, ce moment pourrait apporter des transformations puisque l’ampleur des dépenses requises pour la relance donne aux pays une occasion sans précédent d’effectuer des changements systémiques.
Progrès concernant les accords internationaux pertinents
Les accords internationaux conçus pour promouvoir des sociétés vertes, inclusives et durables comprennent le Programme de développement durable à l’horizon 2030 [en anglais] (Programme 2030) et l’Accord de Paris. Le Programme 2030, qui a été adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies en 2015, prévoit un plan d’action ambitieux pour tous les pays qui vise à atteindre une série d’objectifs socio-économiques et environnementaux par l’entremise de 17 objectifs de développement durable (ODD) dont le but primordial est de « ne laisser personne de côté ».
Dans l’Accord de Paris de 2015, les signataires se sont engagés à réduire suffisamment les émissions de gaz à effet de serre (GES) afin de limiter la hausse de la température à 1,5 °C, ou à une température « nettement en dessous de 2 °C », par rapport à la température mondiale moyenne d’avant l’ère industrielle.
Avant la pandémie de COVID‑19, les progrès [en anglais] réalisés pour atteindre les objectifs du Programme 2030 étaient lents et irréguliers. Des experts ont fait part de leurs préoccupations [en anglais] dans quatre domaines où les indicateurs progressent dans la mauvaise direction : les inégalités au sein des pays et entre ceux-ci, les objectifs en matière de lutte contre les changements climatiques, la perte de biodiversité et l’adoption de modes de consommation et de production durables.
En septembre 2019, l’ONU a lancé une Décennie d’action pour aider à mobiliser des ressources et à accroître les efforts visant à atteindre les objectifs du Programme 2030. Pourtant, en juillet 2020, le secrétaire général de l’ONU a déclaré [en anglais] que la crise provoquée par la pandémie « risque d’enrayer et d’inverser les progrès [traduction] » réalisés vers l’atteinte d’un bon nombre des ODD et qu’elle avait exacerbé les vulnérabilités et les inégalités au sein des pays et entre ceux-ci.
L’ONU a noté [en anglais] que les femmes, les personnes âgées, les jeunes, les peuples autochtones, les minorités, les migrants, les travailleurs autonomes et les journaliers figurent parmi les personnes touchées de manière disproportionnée par la crise économique provoquée par la pandémie. L’ONU prévoit continuer à utiliser le Programme 2030 comme cadre pour aider les pays en développement à se rétablir de la pandémie.
Selon le Rapport 2019 sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions publié par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) en novembre 2019, si les engagements internationaux actuels relatifs à la lutte contre les changements climatiques sont respectés, ils donneront probablement lieu à une hausse de la température mondiale moyenne à la surface du globe de 3,2 °C au-dessus des niveaux d’avant l’ère industrielle, ce qui est bien supérieur à l’objectif fixé dans l’Accord de Paris de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C.
Dans un rapport [en anglais] publié par Carbon Brief, cette organisation estime que les émissions mondiales annuelles de GES en 2020 pourraient être 5,5 % moins élevées que celles de 2019 en raison du ralentissement économique provoqué par la pandémie. On souligne toutefois dans le rapport du PNUE qu’il faudrait que les pays réduisent les émissions « de 7,6 % par an entre 2020 et 2030 [traduction] » pour atteindre l’objectif de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C.
Appels en faveur d’une relance économique verte, inclusive et durable
Les appels en faveur d’une « reconstruction en mieux » au cours de la reprise suivant la pandémie de COVID‑19 renvoient souvent au besoin d’une relance verte, inclusive et durable. Par exemple, une relance « verte » peut désigner une relance économique qui réduit les émissions de GES et la perte de biodiversité. Une relance « inclusive » peut désigner une relance qui réduit les inégalités, comme celles entre les genres et les races, qui tient compte des besoins des personnes pauvres et qui est axée sur le respect des droits de la personne. Le terme « durable » peut désigner les volets du programme international liés au développement durable ou faire référence à une croissance ou une relance économique à laquelle les préoccupations en matière d’équité sociale, de protection des ressources naturelles et de développement social et économique font partie intégrante.
Des pays comme la France, l’Allemagne et la Corée du Sud [en anglais] ont commencé à annoncer des mesures conçues pour appuyer des éléments d’une reprise verte. Parallèlement, des pays comme la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et l’Irlande [en anglais] ont mis en évidence des messages relatifs à l’inclusion, tels que le soutien aux jeunes, dans leurs réponses préliminaires à la pandémie.
De nombreuses organisations internationales ont demandé aux pays d’axer leurs plans de relance sur la croissance verte, inclusive et durable :
- Récemment, Angel Gurría [en anglais], le secrétaire général de l’OCDE, a affirmé qu’il est « essentiel que les gouvernements favorisent une croissance plus résiliente, inclusive et durable. L’objectif ne devrait pas être le retour à la normale – c’est en raison de la normale que nous nous trouvons dans la situation actuelle [traduction] ».
- En mai 2020, lors d’une réunion coorganisée par le Canada, le secrétaire général de l’ONU [en anglais] a déclaré que « [t]ous nos efforts doivent tendre vers l’élaboration de solutions durables et résilientes qui nous permettent non seulement de venir à bout du COVID-19, mais aussi de lutter contre la crise climatique, de réduire les inégalités et d’éliminer la pauvreté et la faim ».
- Le Fonds monétaire international [en anglais] a demandé aux pays de mettre en œuvre des plans de reprise verte, alors que la Banque mondiale [en anglais] a également lancé un appel pour un programme de relance verte.
- Dans un communiqué publié en avril 2020 qui inclut son plan d’action pour soutenir l’économie mondiale pendant la pandémie, le Groupe des 20 [en anglais] (G20) s’est engagé à appuyer une « reprise inclusive et durable sur le plan environnemental [traduction] » qui cadre avec le Programme 2030.
Au cours des derniers mois, des organisations de l’ONU comme le PNUE, ONU Femmes, le Programme des Nations Unies pour le développement et l’Organisation internationale du Travail ont aussi plaidé en faveur d’une forme quelconque de « reconstruction en mieux ».
Des organisations de la société civile ont lancé des appels similaires. Dans une lettre aux dirigeants du G20, 350 organisations de santé représentant plus de 40 millions de professionnels de la santé ont établi le bien-fondé d’une approche scientifique pour une « reprise viable » qui permet notamment de réduire la pollution atmosphérique et les émissions de GES et de protéger les personnes vulnérables. Amnistie internationale a également demandé aux dirigeants du G20 de concentrer leurs efforts sur une « reprise juste » qui soutient les travailleurs, dont les femmes et les groupes marginalisés, et les personnes les plus touchées par les répercussions des changements climatiques.
Dans la même veine, de nombreux représentants du secteur privé préconisent une reprise qui vise à « reconstruire en mieux ». Dans une récente publication intitulée Chief Economists Outlook [en anglais], le Forum économique mondial souligne que, dans le cas où la relance économique après la pandémie de COVID‑19 reprendrait les tendances présentes avant la pandémie, les pays « auront raté une occasion importante de faire la transition vers une croissance plus verte et inclusive [traduction] ».
De plus, en mars 2020, la dirigeante de la We Mean Business Coalition [en anglais] – un groupe d’organisations sans but lucratif qui travaille avec de grandes sociétés pour lutter contre les changements climatiques – a écrit que « les mesures de relance visant à lutter contre la COVID‑19 devraient tenir compte des questions de santé, d’économie et de climat [traduction] ».
Conclusion
De nombreuses institutions internationales préconisent des programmes de relance économique qui peuvent contribuer à l’atteinte d’objectifs de longue date qui ont été convenus à l’échelle mondiale, tels que l’élimination de la pauvreté et le ralentissement des changements climatiques. Ce point de vue est également partagé par la société civile et plusieurs organisations du secteur privé.
Plus de six mois après le début de la pandémie, bon nombre des organisations qui ont demandé une relance économique verte, inclusive et durable ont formulé des recommandations en matière de politique et des lignes directrices que tous les pays peuvent adapter à leur propre contexte. Certaines de ces recommandations et lignes directrices sont énumérées dans la section « Ressources additionnelles » ci-dessous.
Ressources additionnelles
Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA). Post-COVID recovery: An agenda for resilience, development and equality [en anglais].
Forum économique mondial. New Nature Economy Report II: The Future of Nature and Business, 14 juillet 2020 [en anglais].
Forum économique mondial. The COVID-19 recovery can be the vaccine for climate change, 9 juin 2020 [en anglais].
Forum économique mondial. The Great Reset [en anglais].
Initiative financière du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Sustainable Recovery [en anglais].
Organisation de coopération et de développement économiques. Reconstruire en mieux : Pour une reprise durable et résiliente après le COVID‑19, Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID‑19), 5 juin 2020.
Organisation de coopération et de développement économiques. Youth and COVID-19: Response, recovery and resilience, Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID‑19), 11 juin 2020 [en anglais].
Organisation des Nations Unies. Cadre des Nations Unies pour la réponse socioéconomique immédiate à la COVID‑19, avril 2020.
Principes pour l’investissement responsable (PRI). Shaping an inclusive, green and sustainable recovery, 24 juin 2020 [en anglais].
Programme des Nations Unies pour l’environnement. COVID‑19 : mises à jour du PNUE.
Rijsberman, Frank et al. GGGI Technical Report No. 13: Achieving Green Growth and Climate Action Post-COVID-19, Global Green Growth Initiative, juillet 2020 [en anglais].
We Mean Business Coalition. Build Back Better: COVID-19 Policy Response [en anglais].
Auteures : Alison Clegg et Nadia Faucher, Bibliothèque du Parlement
Catégories :Agriculture, environnement, pêches et ressources naturelles, Économie et finances, COVID-19, Lois, justice et droits