Continuité du système de gouvernement du Canada en temps de crise

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Révisée le 5 juin 2020, 9h35
Dans cette Note de la Colline, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.

(Available in English: Continuity in Canada’s System of Government During a Crisis)

Le 13 mars 2020, la Chambre des communes a adopté à l’unanimité une motion pour annuler ses séances prévues jusqu’au 20 avril 2020. Le même jour, le Sénat s’est ajourné jusqu’au 21 avril 2020. Le 20 avril 2020, la Chambre des Communes a adopté une motion visant à ajourner ses séances et à se réunir de façon réduite et virtuelle, et sous la forme d’un comité spécial sur la pandémie de la COVID-19 jusqu’au 25 mai 2020. Le 26 mai 2020, la Chambre des Communes a adopté une autre motion pour ajourner ses séances tout en maintenant le comité spécial jusqu’au 17 juin 2020. Conformément à cette dernière motion, la Chambre des Communes se réunira les 17 juin 2020, 8 juillet 2020, 22 juillet 2020, 12 août 2020 et 26 août 2020.

Depuis la première suspension du Parlement en mars 2020, les parlementaires ont été rappelés et ont siégé quatre fois pour adopter des projets de loi d’urgence.

Même si les activités du Parlement sont actuellement suspendues, le gouvernement fédéral continue de fournir des services et des programmes essentiels aux Canadiens, ici et à l’étranger.

Le système de gouvernement du Canada fonctionne selon des règles constitutionnelles et légales ainsi que des conventions écrites et non écrites. Ces arrangements constitutionnels procurent flexibilité, adaptabilité et continuité.

La présente note résume deux des façons par lesquelles le système de gouvernement du Canada peut poursuivre ses activités en cas de situations imprévues : le maintien du pouvoir de dépenser du gouvernement et la continuité du pouvoir exécutif au Canada.

Maintien du pouvoir de dépenser du Parlement

Pour fonctionner, le gouvernement doit pouvoir compter sur un financement suffisant et continu. Cependant, le Parlement doit autoriser toutes les dépenses du gouvernement, ce qui peut constituer un problème lorsque le Parlement ne siège pas.

1. Législation

Environ 60 % des dépenses fédérales sont autorisées par une loi permanente. Il s’agit notamment des principaux paiements de transfert aux provinces et aux territoires (p. ex., le Transfert canadien en matière de santé) et des transferts aux particuliers (p. ex., les prestations d’assurance emploi). Le pouvoir de faire ces paiements est permanent, mais toute modification à ces paiements doit être approuvée par le Parlement.

Les autres dépenses fédérales (40 %) sont autorisées au moyen de projets de loi de crédits afin de répondre aux demandes de dépenses énumérées dans les budgets principal et supplémentaires de dépenses.

Avant de s’ajourner le 13 mars 2020, le Parlement a adopté un projet de loi de crédits (projet de loi C-11, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2021) pour débloquer des crédits provisoires. Le projet de loi C-11 a sanctionné le financement des organisations fédérales pour qu’elles puissent fonctionner pendant les trois premiers mois de l’exercice 2020-2021 (qui commence le 1er avril), soit jusqu’à ce que le Budget principal des dépenses (ou la totalité des crédits) soit adopté, généralement à la fin du mois de juin.

2. Mandats spéciaux du gouverneur général

Comme la Chambre des communes et le Sénat ne se réunissent pas régulièrement, le gouvernement pourrait ne pas être en mesure de demander au Parlement d’adopter des projets de loi de crédits pour approuver des dépenses supplémentaires qui pourraient être requises de toute urgence pour combattre la COVID-19 et soutenir l’économie et la population canadiennes.

La Loi sur la gestion des finances publiques renferme des dispositions qui permettent, en période électorale, au gouvernement de demander au gouverneur général de signer des mandats spéciaux autorisant des dépenses urgentes nécessaires pour l’intérêt public. Cependant, le gouvernement ne peut pas invoquer ces dispositions étant donné que le Parlement n’a pas été dissous en vue d’une élection.

Le 13 mars 2020, la Chambre des communes et le Sénat ont adopté le projet de loi C-12, Loi modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques (mandat spécial), afin d’autoriser le gouverneur général à signer des mandats spéciaux pendant que le Parlement est suspendu. Le projet de loi comporte aussi plusieurs dispositions de rapport visant les mandats établis. Les dispositions du projet de loi viennent à échéance le 24 juin 2020.

Il est toutefois impossible d’utiliser des mandats spéciaux pour modifier ou créer des autorisations de dépenser ou pour modifier les conditions de paiements autorisés par une loi permanente.

3. Projet de loi d’urgence

Le 25 mars 2020, le Parlement a adopté le projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19. Le projet de loi C-13 prévoit des dépenses pour appuyer les particuliers et les entreprises au Canada, notamment en instaurant une nouvelle prestation canadienne d’urgence et en modifiant les prestations d’assurance-emploi. Il permet aussi au gouvernement de dépenser « les sommes qui sont nécessaires à la prise de toute mesure relativement à un événement de santé publique d’intérêt national ». Cette disposition vient à échéance le 30 septembre 2020.

Le 11 avril 2020, le Parlement a approuvé le projet de loi C-14, Loi no 2 concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19, qui introduit une subvention salariale d’urgence pour soutenir les employeurs.

Le 1er mai 2020, le Parlement a approuvé le projet de loi C-15, Loi concernant la prestation canadienne d’urgence pour étudiants (maladie à coronavirus 2019), qui prévoit un soutien du revenu pour les étudiants qui ont perdu leur travail et des occasions de gagner un revenu en raison de la COVID-19.

Enfin, le 15 mai 2020, le Parlement a approuvé le projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du lait afin de soutenir les producteurs et les transformateurs laitiers en augmentant la capacité de prêt de la Commission canadienne du lait.

Continuité du pouvoir exécutif au Canada

Au Canada, le pouvoir exécutif est formé par le gouverneur général, le premier ministre et le Cabinet.

Tous les projets de loi fédéraux qui visent à dépenser de l’argent ou à lever des impôts doivent être déposés à la Chambre des communes par un ministre du Cabinet, au nom du gouverneur général. Le pouvoir exécutif établit les orientations stratégiques et les priorités de dépenses pour l’ensemble du pays.

La constitution canadienne, et ses conventions non écrites, fournit une orientation fondée sur la jurisprudence et les normes contemporaines et guide la nomination, la durée du mandat et la succession des membres du pouvoir exécutif.

1. Gouverneur général

Nomination : Selon les conventions constitutionnelles, le gouverneur général est nommé par la Reine sur recommandation personnelle du premier ministre canadien. Le pouvoir discrétionnaire de consulter d’autres personnes au sujet de cette nomination appartient au premier ministre. La nomination se fait au moyen d’une commission sous le Grand Sceau du Canada.

Durée du mandat et succession : Habituellement, le gouverneur général est nommé pour mandat de cinq ans. Toutefois, son mandat peut être prolongé. En cas d’absence, de destitution, d’incapacité ou de mort du gouverneur général, le juge en chef ou le doyen des juges de la Cour suprême du Canada assume les pouvoirs du gouverneur général et est désigné administrateur du gouvernement du Canada jusqu’à ce qu’il soit remplacé, le cas échéant, par un nouveau gouverneur général.

2. Premier ministre

Nomination : Le gouverneur général demande au chef du parti politique le plus apte à obtenir la confiance de la Chambre des communes d’assumer la charge de premier ministre. Le concept de gouvernement responsable a évolué pour limiter la discrétion que le gouverneur général peut exercer sur cette nomination.

Durée du mandat et succession : Le premier ministre cesse d’occuper sa charge lorsque le gouverneur général accepte sa démission ou, en des cas exceptionnels, lorsque le premier ministre est démis de ses fonctions par le gouverneur général ou meurt.

Les circonstances entourant la démission du premier ministre, son renvoi ou son décès dictent le plan d’action que suivra le gouverneur général.

Les décisions concernant le processus ou les procédures pour nommer le successeur d’un premier ministre incombent au parti au pouvoir. Jusqu’à maintenant, la tradition veut que, sur recommandation du premier ministre, le Comité du Conseil privé déclare un ordre de succession officiel au sein du Cabinet pour remplacer le premier ministre si celui-ci est dans l’impossibilité d’exercer les fonctions de sa charge.

3. Cabinet fédéral

Nomination : Les ministres du Cabinet sont choisis par le premier ministre et assermentés officiellement par le gouverneur général.

Durée du mandat : Les ministres du Cabinet peuvent être révoqués et remplacés n’importe quand par le gouverneur général sur les conseils du premier ministre. Si un ministre est dans l’impossibilité d’exercer les fonctions de sa charge, le Bureau du Conseil privé a établi une liste de ministres suppléants principaux et secondaires pour chaque ministre. Le Cabinet cesse également d’exister lorsque le premier ministre remet la démission de son Cabinet au gouverneur général.

Auteurs : Andre Barnes, Raphaëlle Deraspe et Alex Smith, Bibliothèque du Parlement 



Catégories :COVID-19, Gouvernement, Parlement et politique, Lois, justice et droits

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