(Available in English: New Rights for Canada’s Air Passengers)
Ces dernières années, il a beaucoup été question dans les médias des mésaventures de passagers aériens canadiens confrontés à un refus d’embarquement, à un retard ou à une annulation de vol, ou encore contraints d’attendre pendant des heures sur la piste de décollage avant de pouvoir s’envoler. Ces reportages laissent à penser que les passagers connaissent souvent mal leurs droits en pareilles circonstances.
C’est pour remédier à ce problème que la Loi sur la modernisation des transports a été édictée en mai 2018. Cette loi oblige l’Office des transports du Canada (l’Office) à prendre des règlements sur les droits des passagers aériens. Ces droits sont énoncés dans le Règlement sur la protection des passagers aériens (le Règlement), qui est entré en vigueur en 2019. Le Règlement impose des obligations au transporteur aérien à l’égard de ses passagers, y compris des indemnités minimales et des normes de traitement dans certaines circonstances. Il impose en particulier des obligations en cas de retard ou d’annulation de vol, de refus d’embarquement (par exemple pour cause de surréservation) et de retard sur l’aire de trafic.
Régime précédent de droits des passagers
Sous le régime précédent, les transporteurs aériens étaient tenus de prévoir des conditions dans leurs tarifs (c.-à-d. leurs contrats avec leurs passagers), qui couvraient sensiblement les mêmes sujets que ceux visés par le nouveau Règlement. Toutefois, sous réserve des décisions de l’Office, les transporteurs étaient généralement libres d’établir leurs propres politiques dans ces domaines.
L’Office était chargé de vérifier que les compagnies aériennes se dotent de tarifs et qu’elles appliquent les conditions prévues par ceux-ci. Il avait aussi le pouvoir de déterminer si un tarif était raisonnable, mais sa décision s’appliquait uniquement aux compagnies aériennes visées par la décision en question.
Retard et annulation de vol, et refus d’embarquement
Le Règlement précise les obligations du transporteur aérien à l’égard de ses passagers en cas de retard ou d’annulation de vol, ou de refus d’embarquement. Le niveau d’obligation varie selon que la situation est attribuable au transporteur ou indépendante de sa volonté :
- Pour une situation indépendante de la volonté du transporteur, comme un acte illégal ou une catastrophe naturelle, celui-ci a uniquement l’obligation de faire en sorte que ses passagers atteignent la destination finale indiquée sur leur billet.
- Pour une situation attribuable au transporteur, mais nécessaire pour des raisons de sécurité, comme un problème mécanique qui n’a pas été détecté durant l’entretien régulier, le transporteur doit respecter les normes minimales de traitement des passagers (p. ex. en leur fournissant nourriture et boissons ainsi qu’un accès à un moyen de communication) et faire en sorte que les passagers atteignent la destination finale indiquée sur leur billet.
- Pour une situation attribuable au transporteur et non liée à la sécurité, comme la surréservation, le transporteur est tenu de respecter les normes minimales de traitement des passagers, de verser une indemnité pour les inconvénients subis et de faire en sorte que les passagers atteignent la destination finale indiquée sur leur billet.
Les tableaux 1 et 2 résument les niveaux minimaux d’indemnisation pour les situations qui sont attribuables au transporteur et qui ne sont pas liées à la sécurité. L’indemnisation des passagers est calculée en fonction de la durée du retard à leur arrivée à destination.
Tableau 1 : Indemnités minimales pour retard et annulation de vol (situation attribuable au transporteur)
Durée du retard à l’arrivée | Indemnités minimales (gros transporteur ) |
Indemnités minimales (petit transporteur) |
Trois heures ou plus, mais moins de six heures | 400 $ | 125 $ |
Six heures ou plus, mais moins de neuf heures | 700 $ | 250 $ |
Neuf heures ou plus | 1 000 $ | 500 $ |
Note : Selon le Règlement, « gros transporteur » s’entend d’une compagnie aérienne « qui a transporté un total de deux millions de passagers ou plus, dans le monde, au cours de chacune des deux années civiles précédentes ». Aux termes du Règlement, tous les autres transporteurs sont considérés comme de « petits transporteurs ».
Tableau 2 : Indemnités minimales pour refus d’embarquement (situation attribuable au transporteur)
Durée du retard à l’arrivée | Indemnités minimales |
Moins de six heures | 900 $ |
Six heures ou plus, mais moins de neuf heures | 1 800 $ |
Neuf heures ou plus | 2 400 $ |
Source : Tableaux préparés par l’auteur à partir de données tirées du Règlement sur la protection des passagers aériens.
Lorsqu’un transporteur aérien reçoit la demande d’indemnisation d’un passager pour cause de retard ou d’annulation de vol, il dispose de 30 jours pour y répondre et verser l’indemnité due, ou expliquer pourquoi le passager n’a pas droit à celle-ci.
L’indemnité pour refus d’embarquement doit être versée dès que la compagnie aérienne est en mesure de le faire sur le plan opérationnel, mais au plus tard 48 heures après le refus d’embarquement.
Retard sur l’aire de trafic
Si les passagers doivent rester à bord d’un avion pour cause de retard sur l’aire de trafic, la compagnie aérienne doit respecter certaines normes de traitement qui doivent comprendre les éléments suivants : accès à des toilettes fonctionnelles; ventilation, chauffage ou climatisation convenables; nourriture et boisson en quantité raisonnable; capacité de communiquer sans frais avec des personnes à l’extérieur de l’avion; et accès à une aide médicale au besoin.
La compagnie aérienne doit aussi donner aux passagers la possibilité de débarquer de l’avion après trois heures d’attente en accordant, si possible d’un point de vue opérationnel, la priorité aux personnes handicapées. Cependant, selon le Règlement, un avion peut rester sur l’aire de trafic pendant 45 minutes supplémentaires sans que le transporteur ne soit tenu de laisser les passagers débarquer si le décollage est imminent et que la compagnie aérienne est en mesure de continuer à respecter les normes de traitement exigées. Sous le régime précédent, certaines compagnies prévoyaient dans leurs tarifs un maximum de 90 minutes d’attente pour les retards sur l’aire de trafic.
En avril 2019, le ministre des Transports a donné instruction à l’Office de prendre un règlement concernant les obligations des transporteurs aériens envers leurs passagers en cas de retards de trois heures ou moins sur l’aire de trafic.
Autres exigences
Outre les exigences décrites ci-dessus, le Règlement comprend des dispositions concernant les communications en langage clair, les bagages endommagés ou perdus, l’attribution de sièges aux enfants de moins de 14 ans et le transport des instruments de musique.
Les dispositions sur les communications en langage clair obligent la compagnie aérienne à afficher un avis écrit contenant la description réglementaire des droits et des recours des passagers, comme les normes de traitement et les indemnités prévues. L’avis doit aussi contenir le site Web de la compagnie aérienne ou celui de l’Office. De même, en cas de perturbation d’un vol (retard, annulation ou refus d’embarquement), la compagnie aérienne doit informer ses passagers des raisons de la perturbation et les tenir au courant de l’évolution de la situation.
Selon les dispositions d’exécution du Règlement, une personne physique s’expose à une amende d’un maximum de 5 000 $ par infraction, tandis que, dans le cas d’une personne morale (comme un transporteur aérien), cette amende peut aller jusqu’à 25 000 $ par infraction. En date du 8 novembre 2019, l’Office avait imposé des amendes à plusieurs transporteurs (de 2 500 $ par infraction) pour défaut d’affichage d’un avis sur les droits des passagers dans divers aéroports canadiens :
- Delta Airlines Inc.: 2 500 $ pour une infraction;
- United Airlines Inc.: 10 000 $ pour quatre infractions;
- WestJet: 17 500 $ pour sept infractions;
- Air Canada: 12 500 $ pour cinq infractions;
- Porter Airlines Inc.: 7 500 $ pour trois infractions;
- Air Transat A.T. Inc.: 7 500 $ pour trois infractions.
Perspectives d’avenir
Les défenseurs du Règlement sur la protection des passagers aériens estiment que cet instrument contribuera à améliorer la clarté, la justesse, la transparence et l’uniformité des politiques des transporteurs sur le traitement de leurs passagers. Le Règlement fait toutefois l’objet d’un débat et deux contestations judiciaires sont en cours : une lancée par des transporteurs aériens [en anglais seulement] et l’autre, par des défenseurs des consommateurs et des personnes handicapées [en anglais seulement].
Ressources supplémentaires
Chong, Jed. Les droits des passagers aériens au Canada et ailleurs dans le monde, publication no 2018‑09‑F, Ottawa, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, 28 février 2018.
Comité d’examen de la Loi sur les transports au Canada. « Chapitre 9 : Transport aérien », Parcours : Brancher le système de transport du Canada au reste du monde – Tome 1, 2015.
Office des transports du Canada.
- Protection des passagers aériens : Les guides de mise en œuvre du RPPA maintenant disponibles.
- Faits saillants du Règlement sur la protection des passagers aériens.
- Protection des passagers aériens : Connaissez vos droits.
- Consultation à propos du Règlement sur la protection des passagers aériens – Ce que nous avons entendu.
Auteur : Jed Chong, Bibliothèque du Parlement
Catégories :Industrie, entreprises et commerce, Lois, justice et droits