Une nouvelle ère pour l’OTAN : certains résultats du Sommet de l’OTAN de 2018 à Bruxelles

Temps de lecture : 5 minutes

(Available in English: NATO in a New Era: Selected Outcomes from the 2018 NATO Brussels Summit)

Depuis 1957, année où s’est tenu le tout premier sommet, à Paris, les sommets de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) servent de plateforme pour communiquer les orientations stratégiques aux institutions et aux États membres de l’Organisation.

Ces sommets, qui réunissent les chefs d’État et de gouvernement des États membres pour prendre d’importantes décisions politiques, visent à leur permettre d’afficher visiblement leur unité et leur détermination. Souvent tenus à des moments critiques du processus décisionnel de l’OTAN, ces sommets sont considérés comme des étapes importantes qui marquent l’évolution de l’OTAN au fil du temps.

Le Canada est un membre fondateur de l’OTAN et participe activement à ses opérations depuis 1949. Il continue aujourd’hui d’y apporter d’importantes contributions, et plusieurs nouveaux engagements ont été annoncés au Sommet de l’OTAN de 2018, qui s’est tenu à Bruxelles.

Les sommets de 2014 et de 2016

En 2014 et en 2016, la détérioration de la sécurité à l’intérieur et au-delà des frontières de l’OTAN a conduit à la tenue de deux sommets historiques.

Les décisions prises lors du Sommet de 2014 au Pays de Galles comprenaient notamment un engagement en matière d’investissements de défense, visant à assurer un partage plus équilibré des coûts et des responsabilités au sein de l’OTAN grâce à deux mesures : l’augmentation progressive des dépenses de défense pour atteindre 2 % du produit intérieur brut (PIB) et l’allocation de 20 % des dépenses annuelles de défense aux équipements majeurs.

Dans la foulée des engagements pris en 2014, le Sommet de 2016 à Varsovie a établi une « présence avancée renforcée » de l’OTAN, comprenant des groupements tactiques multinationaux de la taille de bataillons en Estonie, en Lettonie, en Lituanie et en Pologne. Ces groupements tactiques sont conçus pour décourager une éventuelle agression contre les États membres.

Le contexte du Sommet de 2018

Depuis 2016, l’OTAN a pris des mesures pour s’adapter aux menaces conventionnelles et non conventionnelles qui caractérisent de plus en plus le contexte sécuritaire moderne. Cependant, un certain nombre de défis nuisent à sa capacité de se défendre contre une Russie renaissante, avec ses capacités militaires modernisées et ses tactiques de guerre hybrides provocatrices.

De plus, à la frontière sud de l’OTAN, de violents conflits armés ont déstabilisé la région du Moyen‑Orient et de l’Afrique du Nord, créant à la fois des problèmes de sécurité et des divisions plus profondes sur la manière de faire face aux flux de réfugiés et aux mouvements migratoires sans précédent.

Par ailleurs, dans la perspective du Sommet de 2018 à Bruxelles, la question du partage des charges a dominé les discussions sur l’OTAN, en grande partie à cause des avertissements publics du président Trump concernant les dépenses de défense des États membres.

Pour de nombreux observateurs, la combinaison de pressions internes et externes menaçait d’éroder la confiance sur laquelle repose l’OTAN. Toutefois, les Alliés ont produit à l’issue du Sommet une déclaration comprenant 79 paragraphes de fond exposant les nouveaux engagements pris et réaffirmant que les membres de l’OTAN « resteron[t] unis et continueron[t] d’agir ensemble, sur la base de la solidarité, d’une finalité partagée et d’une répartition équitable des charges ».

Au Sommet de 2018 à Bruxelles, le premier ministre Trudeau a annoncé un soutien accru à l’OTAN comme pierre angulaire de la politique de sécurité internationale du Canada. Il a également pris des engagements précis concernant certaines initiatives.

Une alliance transatlantique

La Déclaration de Bruxelles sur la sécurité et la solidarité transatlantiques, adoptée au Sommet, confirme à la fois le « lien transatlantique immuable et infrangible » entre l’Europe et l’Amérique du Nord, et souligne que l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord — une attaque contre un membre de l’OTAN est considérée comme une attaque dirigée contre tous les membres — demeure un principe fondamental de la défense collective. Conscients des progrès accomplis en ce qui concerne l’augmentation des dépenses de défense, les États membres ont réitéré qu’ils étaient déterminés à respecter leur engagement de 2014 en matière d’investissements de défense.

Le gouvernement du Canada a accepté de présenter des plans nationaux concernant la mise en œuvre de l’engagement en matière d’investissements de défense. Bien que le gouvernement se soit engagé à augmenter progressivement les dépenses en défense pour atteindre l’objectif de 2 % du PIB, il considère que des capacités et des contributions de haute qualité aux opérations et aux missions sont des éléments essentiels du partage des charges.

La nouvelle politique de défense du Canada, Protection, sécurité, engagement (2017), prévoit une augmentation des dépenses de défense du Canada qui devraient atteindre 1,4 % du PIB d’ici 2024‑2025 et l’allocation de 32,3 % des dépenses à l’équipement majeur d’ici la même période.

Assurance et dissuasion dans l’Est

La Déclaration réaffirme l’engagement des États membres à renforcer les mesures de dissuasion en Europe centrale et de l’Est. Il y est aussi question de la mise en œuvre de la présence avancée renforcée de l’OTAN, qui compte actuellement 4 500 soldats alliés déployés en Estonie, en Lettonie, en Lituanie et en Pologne.

Le premier ministre Trudeau a rendu visite au groupement tactique dirigé par le Canada en Lettonie avant le Sommet et a annoncé la prolongation de l’Opération REASSURANCE — soit la contribution du Canada à la présence avancée renforcée de l’OTAN — jusqu’au 31 mars 2023, et l’augmentation du nombre de membres des Forces armées canadiennes (FAC) déployés en Lettonie, qui doit passer de 455 à 540.

Préparation et mobilité

Les États membres ont convenu de prendre des mesures pour rendre leurs forces plus agiles, interopérables et déployables, et ont lancé l’initiative de préparation de l’OTAN. Cette initiative implique un engagement collectif à fournir 30 principaux navires de combat, 30 bataillons lourds ou moyens et 30 escadrons aériens capables de se déployer en 30 jours.

Ils ont également approuvé des modifications à la structure de commandement de l’OTAN, créant deux nouveaux commandements : le commandement des forces interarmées de Norfolk, en Virginie, chargé de la protection des lignes de communication transatlantiques, et le commandement interarmées de soutien et de la logistique, à Ulm, en Allemagne, chargé de faciliter l’entrée et le déplacement rapides des troupes en Europe.

Le premier ministre Trudeau a annoncé que, d’ici cinq ans, le Canada affectera jusqu’à 25 militaires au programme du système aéroporté d’alerte et de contrôle de l’OTAN, l’une des rares ressources militaires détenues et exploitées par l’OTAN.

Cyberdéfense

La Déclaration affirme que l’OTAN doit être capable de contrer efficacement les cybermenaces, qui deviennent de plus en plus fréquentes et complexes, notamment dans le cadre d’une campagne hybride. La création d’un centre des cyberopérations à Bruxelles, qui sera axé sur la connaissance de la situation et chargé d’assurer la coordination des activités de l’OTAN dans le cyberespace, a été annoncée au Sommet.

Le premier ministre Trudeau s’est également engagé à se joindre au Centre d’excellence pour la cyberdéfense en coopération [en anglais seulement], à Tallinn, en Estonie.

Lutte contre le terrorisme

Les États membres ont convenu d’allouer des ressources humaines et financières à l’appui d’un rôle accru dans la lutte internationale contre le terrorisme et de lancer une mission de formation et de renforcement des capacités sans combat pour soutenir les efforts de stabilisation en Irak. Ils ont également indiqué qu’ils continuaient d’appuyer la Mission Resolute Support de l’OTAN [en anglais seulement] en Afghanistan, où les forces forment, conseillent et aident les forces de défense et de sécurité nationales afghanes.

Le gouvernement du Canada a annoncé que le Canada assumera le commandement d’une nouvelle mission de formation et de développement des capacités de défense de l’OTAN en Irak pour la première année. De plus, le Canada affectera un major-général, un conseiller en matière d’égalité entre les sexes et jusqu’à 250 membres des FAC en Irak pour se concentrer sur la formation des services de sécurité irakiens et sur l’aide au renforcement des capacités institutionnelles.

Conclusion

Dans un rapport sur le Canada et l’OTAN publié en 2018 par le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes, on peut lire qu’en fin de compte, la force et la valeur de l’OTAN résident dans l’unité de ses membres. Alors que l’OTAN poursuit ses efforts en faveur de la paix et de la stabilité dans la région euro‑atlantique, elle est confrontée à un environnement de sécurité en évolution rapide, caractérisé par de nouveaux secteurs de conflit ainsi que par des menaces persistantes. Pour s’adapter à ces défis convergents, la solidarité est peut-être le meilleur atout de l’OTAN.

Ressources supplémentaires

Carnegie Endowment for International Peace, The Return of Global Russia [en anglais seulement].

Jeffrey Rathke, NATO: Measuring Results, not Dollars, in Transatlantic Security, Center for Strategic and International Studies, 9 juillet 2018 [en anglais seulement].

Andrew Rasiulis, Canada’s Military Operations on NATO’s Eastern Flank: Why They Matter, Institut canadien des affaires mondiales, juillet 2017 [en anglais seulement].

Auteure : Katherine Simonds, Bibliothèque du Parlement



Catégories :Affaires internationales et défense, Gouvernement, Parlement et politique

Tags:, , , , , , , ,

%d blogueurs aiment cette page :